Circuit court et confinement. Déjà à l'oreille, ça sonnait mal, ça frottait. Parce que qui dit circuit court dit contacts humains, échanges multiples. Si on ajoute gestes barrière et fermeture des marchés de plein vent, ça dissone carrément.
Le début des mesures de confinement laissait présager un sort funeste pour les circuits de proximité, marchés et magasins de producteurs, paniers Amap ou paysans, systèmes de vente directe en ligne. Tout le monde allait filer faire toutes ses courses à l’hyper, c’était foutu.
Mais non. Cette crise est une boule à neige : elle secoue tout et on ne sait pas bien où et comment les flocons vont retomber. Alors que les experts eux-mêmes changent d’avis officiel en quelques jours, difficile de se prononcer et encore plus de prédire.
Quand on milite et qu’on oeuvre depuis dix ou quinze ans pour le développement des circuits courts et qu’on se rend compte qu’en deux semaines, la propagation d’une particule fait tripler les ventes de certains producteurs, au début, ça sidère. Voire ça vexe. Ah bon il fallait une pandémie ? On peut fermer boutique alors, job is done.
Bien sûr que non.
Bien au contraire : tout reste à faire.
1- En effet, si la ruée des consommateurs pour les produits locaux est possible, c’est bien parce que, depuis des années, des producteurs, artisans, associations, épiceries et entreprises les construisent et les font vivre.
2- Ensuite et surtout, parce que tous ne sont pas logés à la même enseigne. C’est encore l’effet boule à neige : quand certains vendent leurs productions de la semaine en une heure, beaucoup d’autres peuvent avoir perdu tous leurs débouchés : cantines scolaires, restaurants, marchés de plein air. D’autres, encore, croulent sous les commandes et n’ont pas toujours les moyens humains ou matériels de les honorer. Certains enfin n’ont plus de salariés saisonniers (et d’ailleurs, quid de tous ces travailleurs étrangers saisonniers qui vont perdre ici un revenu annuel essentiel ?).
3- Parce que demain, après, on ne sait rien : l’engouement pour le local va-t il perdurer, combien de récoltes perdues, combien de restaurants en faillite, combien de portefeuilles amaigris par la récession ?
Tout reste à faire, pour nous comme pour tous les acteurs des circuits alimentaires de proximité. Heureusement, tout le monde s’y met : outre le gouvernement qui appelle les citoyens à travailler aux champs et la GMS à vendre français, d’innombrables initiatives se mettent en place pour aider les producteurs à vendre et les consommateurs à remplir leurs assiettes de goût et de solidarité. Vous en trouverez quelques-unes ici, là , là et là encore.
Alors qui vit quoi ?
C’est par là que nous avons besoin, chez D.I.X., de commencer, en nous tournant d’abord vers ceux que nous accompagnons. Mieux comprendre pour mieux accompagner. C’est ainsi que nous avons donc choisi de recueillir chaque semaine le témoignage d’un acteur des circuits courts. A côté des témoignages des confinés, des malades et des soignants, comment s’organisent ceux qui oeuvrent à nous nourrir tous les jours ?
Cette semaine nous sommes allés rencontrer ( par écran interposé) Jonathan, que nous accompagnons dans le développement de son réseau d’Échoppes.