Depuis plusieurs années, les consommateurs veulent que leurs achats participent à un modèle de production, de transformation et de distribution plus durable. Ils souhaitent consommer plus de bio, du local, favoriser le bien-être animal, le développement de leur région, et mieux rémunérer les producteurs.
Mais entre la théorie et la pratique, il y a toujours un pas. Même pour un consommateur sensibilisé, il n'est pas toujours facile de consommer en accord avec ses aspirations, par manque de temps, de budget, de connaissance,...
En tant que commerçant ou artisan, vous avez une grande responsabilité, car vous choisissez directement le mode de consommation que vous souhaitez privilégier pour vos clients, à travers le choix de vos fournisseurs. En choisissant de vous fournir en circuits dits “courts”, vous faites partie des acteurs engagés et vertueux.
Les conseils que vous trouverez dans ce guide vous aideront dans la préparation et la mise en œuvre du changement.
Quelques définitions en introduction
Alimentation locale, circuit court, développement durable ? Nous vous proposons en introduction 5 définitions pour s’assurer que nous parlons le même langage :
Durable
Pour commencer ce schéma illustre bien les thématiques liées au développement durable qui s’inscrit dans une perspective de long terme et qui met au même plan l'impact économique, environnemental et social d'un projet.
Agriculture durable
Si l’on utilise la définition précédente, une agriculture durable doit donc permettre de nourrir la population dans le respect de l’environnement, en étant accessible économiquement et rémunératrice pour les producteurs. Tout un défi!
Alimentation durable
L’alimentation durable est une alimentation issue d’une agriculture durable. Il est important de se renseigner sur les étapes qui peuvent être nécessaires entre le champ et l’assiette : la transformation des produits, et la logistique, qui, elles aussi peuvent être organisées de manière durable (livraison optimisée et décarbonée, ...)
Circuit court
Le ministère de l’agriculture a donné sa définition officielle il y a quelques années : “C’est un mode de commercialisation qui s'exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte à condition qu'il n'y ait qu'un seul intermédiaire”. Autrement dit, qu’un seul changement de propriété de “marchandise” entre l’agriculteur et le consommateur. Par définition, un produit acheté en circuit court correspond donc à l’achat d’un produit alimentaire d’au maximum une seconde main.
Circuit de proximité
Les circuits de proximité ne sont, contrairement aux circuits courts, pas clairement définis ; globalement chaque acteur à sa propre définition, mais le principe reste de consommer local, et le consensus autour de la distance géographique est de 150 km. Ce terme vient compléter la définition du circuit court en assurant, sans être une garantie, une “proximité” d’avec l’intermédiaire. En effet, dans le cadre d'un “circuit court”, le consommateur peut acheter des bananes qui n’ont eu comme intermédiaire qu’un unique grossiste.
On parle aussi souvent de “produits locaux”, qui ne sont pas clairement définis mais peuvent être assimilés à des “produits issus des circuits de proximité”
Dans l’usage et pour la plupart des consommateurs ces 2 notions sont souvent mélangées et les termes utilisés ne sont pas toujours les bons. Si l’on souhaite à la fois travailler en direct ou au maximum avec un intermédiaire, et localement, on peut donc mixer les 2 notions et parler de circuits courts de proximité
Pourquoi s’engager dans une démarche en circuit court et mettre en place un approvisionnement local ?
Vous êtes artisans ou commerçants ? Voici au moins 5 bonnes raisons pour vous aider à franchir le cap.
1 - Répondre à la demande des consommateurs
La demande est très forte du côté des consommateurs, et ce depuis plusieurs années : 77 % des consommateurs déclarent essayer d’acheter des produits locaux aussi souvent que possible (source : étude LinkQ Labels/Mentions, septembre 2017, Kantar Worldpanel)
Et c’est un marché encore en développement : les achats en circuits courts représentent moins de 15% des achats alimentaires (source : PIPAME - Économie sociale et solidaire : la filière des circuits courts alimentaires 2017), le potentiel de développement est donc important.
2 - Redonner confiance aux consommateurs en renseignant l’origine des produits
Les Labels sont connus mais trop nombreux et pas toujours lisibles : 66% des français sont attentifs aux labels, mais seulement 53% en ont confiance (source : dossier spécial LSA 2020)
Avec des produits en circuit court, vous pouvez aller plus loin : l’agriculteur et le commerçant endossent le rôle de “label confiance”, et plus qu’un numéro de lot, vous pouvez raconter l’histoire de vos produits (et de leurs producteurs), informer sur leur origine et leurs conditions de production
3 - Rémunérer plus justement les producteurs
Dans les filières longues, il y a souvent beaucoup d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur, et la marge du producteur est réduite. Le fait de travailler directement avec des producteurs permet en général de connaître et d’augmenter leur marge en limitant les intermédiaires.
4 - Modifier son image et son positionnement
Développer une démarche en circuit court vous permet d’enrichir votre offre, et de vous différencier de vos concurrents en proposant un produit à plus forte valeur ajoutée: la mise en place d’un approvisionnement local vous permet de vous ancrer sur le territoire et de créer du lien avec un réseau d’agriculteurs et d’artisans passionnés par leur métier.
5 - Développer votre activité !
Enfin, c’est une occasion de faire évoluer votre activité, et de la faire connaître plus largement et notamment aux consommateurs sensibles à votre démarche.
Nos 6 conseils pour démarrer
Développer son activité en mettant en place un approvisionnement local ne demande pas la même organisation si vous êtes artisan ou commerçant : si vous êtes un artisan alimentaire, vous pouvez envisager de chercher un sourcing de vos matières premières localement. Pour les commerçants, cela permet avant tout de savoir ce que l’on vend, et de proposer des produits locaux de qualité.
1 - S’adapter au contexte local : une diversité de production selon les régions
Élevage, arboriculture, maraîchage, grandes cultures, viticulture...: l’agriculture sur le territoire Français métropolitain est très variée et s’adapte au contexte local (climat, sol, géographie …). Ainsi chaque projet lié à l'alimentation locale sera différent en fonction de son territoire. Avant de démarrer son projet, il est donc important de se renseigner sur le “potentiel” agricole local.
Source infographie : ministère de l’agriculture
Depuis 2014, sous l'impulsion du ministère de l'agriculture, plus d'une centaine de Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) ont été lancés en France. Renseignez vous auprès des personnes en charge sur votre territoire, cela vous permettra de bénéficier du diagnostic de la production agricole et locale, et surtout de vous mettre en lien avec l'ensemble des acteurs de l'alimentation durable de votre territoire.
2 - Etre vigilant sur la qualité des produits
En changeant son approvisionnement, il faut rester attentif sur la qualité des produits. Même si un produit local sera souvent meilleur (et notamment pour les fruits et légumes car cela permet d’avoir un produit fraîchement récolté, qui n’a pas ou peu été stocké), il est important de se renseigner sur les pratiques de production de vos producteurs avant de les sélectionner.
Pour être sûr de la qualité, vous pouvez vous baser sur les labels nationaux ou européens : AOC, IGP, AOP, Agriculture biologique, STG, Label Rouge.
Ils sont plutôt bien identifiés par le grand public et présentent l’avantage d’avoir des cahiers des charges rigoureux et des pratiques contrôlées par un organisme indépendant.
À titre d’exemple : un poulet “Label Rouge” doit forcément avoir vécu plus de 100 jours, avoir un accès plein air, et une alimentation de qualité, alors qu’un poulet “industriel” aura une surface de cage limitée et sera abattu en moyenne au bout de 40 jours.
Moins connu que les labels, vous pouvez aussi faire confiance aux mentions valorisantes : « Produit de montagne », « fermier », « issu d'une exploitation de haute valeur environnementale ». Enfin n’oubliez pas de déguster les produits !
L’idéal est bien sûr de se rendre sur place et de visiter directement l’exploitation d’un producteur qui vous intéresse.
3 - Prendre en compte la saisonnalité
Il existe une saisonnalité importante en agriculture, qui est variable selon les types de production. Le plus évident et bien connu du grand public concerne les fruits et légumes, qui varient en fonction des saisons (quoique tout cela est un peu bousculé car il est possible d’avoir des légumes d’été en hiver grâce à des serres chauffées, d'où l'importance d’interroger les pratiques agricoles !). Mais il y a aussi un impact de la saisonnalité sur d’autres types de produits, comme les fromages de chèvre, dont la production de lait s’arrête l’hiver, si l’éleveur ne "désaisonne" pas.
De même pour les produits de la pêche : naturellement et localement, tous les poissons et coquillages ne sont pas disponibles toute l’année.
Globalement, il faut bien comprendre que tous les produits ne sont pas toujours disponibles tout le temps. En tant que professionnel, vous pouvez anticiper et prévenir les consommateurs, mais surtout les informer sur ces sujets.
4 - Prendre le temps des rencontres humaines
Agriculteur, paysan, exploitant, éleveur, artisan, producteur, transformateur... beaucoup de termes pour définir des personnes et des activités très variées. Dans l’agriculture et dans l’artisanat alimentaire, il y a donc une diversité de métiers et une diversité des profils. De par leur activité, certains ont des contraintes horaires fortes (exemple : traite le matin tous les jours pour les éleveurs laitiers), d’autres ont des pics d’activité très intenses et stressants pendant quelques semaines (exemple : surveillance pendant les gelées de printemps, récolte des fruits et légumes qui arrivent tous à maturité, vendange,...).
Pour travailler efficacement avec un producteur, il faut savoir s’adapter à leurs contraintes, et s’intéresser à eux. Nous conseillons fortement de “prendre le temps” de la rencontre et d’aller découvrir les produits sur le terrain.
Selon l’ambition de votre projet et le nombre de producteurs avec qui vous souhaitez démarrer une collaboration, donnez vous de 2 à 6 mois en comptant une demi-journée de temps en temps pour rencontrer vos futurs producteurs partenaires.
Avant de prendre contact avec eux, nous vous conseillons de vous renseigner sur leurs métiers afin de préparer les points à aborder.
5 - Comment démarrer? définir son positionnement, constituer son offre et établir les règles
Pour démarrer, nous vous conseillons de construire votre “cahier des charges”, qui permettra de poser les premiers éléments de la démarche que vous souhaitez mettre en place.Pour cela, n’hésitez pas à vous inspirer de la charte de projets engagés que vous connaissez.Voici une liste de questions qui vous permettra de connaître votre positionnement sur les points principaux :
- Quelle est ma définition de la "proximité'' (de la Commune, Agglomération, Département, Région, France) ? Est-ce plutôt une question de distance ou de territoire ?
- Quelle est la gamme de produits que je recherche : Produits Frais / Épicerie / Alcool .. ? Y-a-t’il une priorisation si la gamme de produits souhaités est large ?
- Avec quel type de fournisseurs je souhaite travailler ? Agriculteurs (quel type de structure, petite ou grande exploitation ?), artisans, PME et petits industriels...
- Pratiques agricoles ou artisanales : est-ce que vous souhaitez vous appuyer sur un cahier des charges (Agriculture Biologique?) ou préférez-vous étudier au cas par cas les pratiques de vos fournisseurs ?
Nous vous conseillons donc de sélectionner des producteurs ou éleveurs faisant des efforts minimaux sur leur communication, ou bien de prendre vous-même des photos, voire des vidéos, lorsque vous leur rendrez visite. Vous pourrez ensuite présenter ces contenus dans votre commerce.
6 - L’erreur à ne surtout pas commettre: oublier de… Communiquer sur son engagement !
L'erreur principale est d’oublier ou de ne pas prendre le temps de bien communiquer sur les démarches que l’on a mises en place. On voit très souvent des acteurs des circuits courts qui ne valorisent pas ce qu’ils font. Voici quelques recommandations pour vous aider à réfléchir et construire votre communication :
- Personnalisez et prenez le temps d’avoir de belles photos des produits et de vos partenaires. Et racontez des histoires !
- L’humain est très important dans les circuits courts. Mettez-vous en avant, ainsi que vos partenaires.
- Indiquez des informations complètes et transparentes sur vos produits et partenaires (Origine géographique, Mode de production, Producteur (prix payé, informations, contact…)...)
- Soyez présents sur internet avec à minima un site vitrine, et un référencement sur les annuaires gratuits
Vous êtes un acteurs de territoire et vous souhaitez être accompagné dans votre démarche ?